Quelles sont les modalités de renouvellement d'un contrat de bail commercial à l'initiative du preneur à bail ? C'est la question à laquelle nous répondons dans cet article.
En principe, une bail commercial est conclu pour une durée de 9 ans. L'article L145-4 du Code de commerce prévoit en effet que : "la durée du contrat de location ne peut être inférieure à 9 ans".
Une fois l'échéance de 9 ans arrivée, le preneur peut vouloir solliciter le renouvellement de son bail commercial, pour lui assurer la poursuite de son activité, la conservation de son local et la pérennité de son entreprise.
Fort heureusement, qui dit échéance du bail commercial ne dit pas pour autant fin du bail commercial et obligation de quitter les lieux ! En effet, un bail commercial ne prend pas fin de plein droit à l’arrivée du terme contractuel, mais ne prend fin que par l’effet d’un congé ou d’une demande de renouvellement. A l'échéance, le contrat de bail commercial se poursuit aux mêmes clauses et conditions tant qu'il n'a fait pas l'objet d'un congé ou d'une demande de renouvellement.
C’est l’article L145-9, alinéas 1 et 2, du Code de commerce, qui précise le régime applicable à la fin du bail commercial:
« Par dérogation aux articles 1736 et 1737 du code civil, les baux de locaux soumis au présent chapitre ne cessent que par l'effet d'un congé donné six mois à l'avance ou d'une demande de renouvellement.
À défaut de congé ou de demande de renouvellement, le bail fait par écrit se prolonge tacitement au-delà du terme fixé par le contrat. Au cours de la tacite prolongation, le congé doit être donné au moins six mois à l'avance et pour le dernier jour du trimestre civil ».
Il faut donc un acte positif émanant du bailleur ou du locataire pour mettre fin au bail commercial.
Nous nous intéresserons ici à la question du renouvellement du bail commercial à l’initiative du preneur, en l’absence de congé délivré par le bailleur.
L’article L145-10 du Code de commerce traite en détail la question du renouvellement du bail commercial à l’initiative du locataire, laquelle est soumise à un certain nombre de mentions obligatoires:
"A défaut de congé, le locataire qui veut obtenir le renouvellement de son bail doit en faire la demande soit dans les six mois qui précèdent l'expiration du bail, soit, le cas échéant, à tout moment au cours de sa prolongation.
La demande en renouvellement doit être notifiée au bailleur par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Sauf stipulations ou notifications contraires de la part de celui-ci, elle peut, aussi bien qu'à lui-même, lui être valablement adressée en la personne du gérant, lequel est réputé avoir qualité pour la recevoir. S'il y a plusieurs propriétaires, la demande adressée à l'un d'eux vaut, sauf stipulations ou notifications contraires, à l'égard de tous.
Elle doit, à peine de nullité, reproduire les termes de l'alinéa ci-dessous.
Dans les trois mois de la notification de la demande en renouvellement, le bailleur doit, par acte extrajudiciaire, faire connaître au demandeur s'il refuse le renouvellement en précisant les motifs de ce refus. A défaut d'avoir fait connaître ses intentions dans ce délai, le bailleur est réputé avoir accepté le principe du renouvellement du bail précédent.
L'acte extrajudiciaire notifiant le refus de renouvellement doit, à peine de nullité, indiquer que le locataire qui entend, soit contester le refus de renouvellement, soit demander le paiement d'une indemnité d'éviction, doit saisir le tribunal avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date à laquelle est signifié le refus de renouvellement."
Il est donc fortement conseillé de se faire assister par un avocat lors du renouvellement du bail commercial pour éviter de voir sa demande de renouvellement éventuellement frappée de nullité, et le loyer commercial automatiquement déplafonné à la fin de la douzième année.
Plusieurs points de vigilance méritent d’être signalés sur la question du renouvellement du bail commercial à l’initiative du locataire.
Votre bail arrive à échéance et vous souhaitez être accompagné dans le cadre de son renouvellement ?
1. Demander le renouvellement du bail commercial ou laisser le bail se poursuivre tacitement au-delà du terme ? Nos recommandations en vue de l’arrivée de l’échéance du bail commercial
La demande de renouvellement est l’acte par lequel le locataire, qui n’a pas reçu de congé, déclare vouloir obtenir le renouvellement de son contrat de bail commercial.
En l’absence de congé délivré par le bailleur, le locataire dispose de deux options:
Garder le silence, auquel cas le bail commercial se poursuivra tacitement
Notifier au bailleur une demande de renouvellement du bail commercial
Nous déconseillons la première option en raison du risque de déplafonnement automatique du loyer à l’issue de la douzième année en cas de tacite prolongation du bail.
Le locataire pourra avoir intérêt à prendre les devants et provoquer le renouvellement du bail commercial :
Si la valeur des locaux a baissé et qu’il veut faire fixer son loyer à la baisse
Pour éviter un déplafonnement automatique du loyer à l'issue de la douzième année
En cas de cession de fonds de commerce : l’acquéreur peut préférer acheter un fonds de commerce dont le bail vient d’être renouvelé avec un loyer connu
Pour anticiper un évènement qui pourrait constituer un motif de déplafonnement
Notre recommandation est donc d'être proactif et de demander le renouvellement du bail commercial plutôt que de laisser le bail se poursuivre par l'effet de la tacite prolongation.
2. À quelle date la demande de renouvellement du bail commercial par le locataire doit-elle être effectuée ?
Selon l’article L145-10 du Code de commerce, la demande de renouvellement peut être signifiée :
Soit dans les 6 mois qui précèdent l’expiration du bail
Soit à tout moment pendant le cours de la tacite prolongation
ATTENTION : une demande faite plus de 6 mois avant l’expiration du contrat de bail est prématurée, et sans effet. Il convient donc d’être attentif à la date d’expiration du bail pour formuler sa demande de renouvellement dans les délais.
Si la demande de renouvellement est signifiée dans les 6 mois précédents le terme contractuel, elle prendra effet au lendemain de la date d’expiration du bail.
Si la demande de renouvellement est signifiée en cours de tacite prolongation, donc à l’issue de la 9ème année, le bail prendra fin le dernier jour du trimestre civil au cours duquel la demande est signifiée et le renouvellement prendra effet au premier jour du trimestre civil suivant.
3. Quels sont la forme et le contenu de la demande de renouvellement du bail commercial par le locataire ?
La forme et le contenu de la demande de renouvellement sont strictement encadrés. Depuis la loi n°2015-990 du 6 août 2015, la demande de renouvellement peut être faite par lettre recommandée avec accusé de réception ou par acte extrajudiciaire, c’est-à-dire par l’intermédiaire d’un commissaire de justice (anciennement huissier de justice).
L’article L145-10 alinéa 4 du Code de commerce doit être strictement reproduit dans la demande de renouvellement :
« Dans les trois mois de la notification de la demande en renouvellement, le bailleur doit, par acte extrajudiciaire, faire connaître au demandeur s'il refuse le renouvellement en précisant les motifs de ce refus. À défaut d'avoir fait connaître ses intentions dans ce délai, le bailleur est réputé avoir accepté le principe du renouvellement du bail précédent ».
Le défaut de reproduction des termes de cet article entraîne la nullité de la demande de renouvellement, sous réserve que le destinataire de l’acte justifie d’un grief.
4. Qui sont l’auteur et le destinataire de la demande de renouvellement ?
La réponse à cette question peut paraître simple de prime abord : le locataire est l’auteur de la demande de renouvellement et le destinataire est le bailleur.
Mais quelques précisions s’imposent :
En cas de pluralité de locataires, la demande de renouvellement doit être faite au nom de chacun d’eux. Si un seul des cotitulaires du bail souhaite notifier la demande de renouvellement, il devra alors avoir reçu un mandat des autres cotitulaires.
Le destinataire de la demande de renouvellement est le bailleur ou son gérant, qui est réputé avoir qualité pour recevoir la demande. En cas de pluralité de bailleurs, la demande de renouvellement pourra être adressée à l’un d’eux uniquement, mais celui-ci ne pourra pas répondre sans l’accord des autres coïndivisaires.
En cas de démembrement de la propriété, la demande de renouvellement doit être adressée au nu-propriétaire et à l’usufruitier, mais ne peut pas être adressée au seul usufruitier sous peine de nullité de la demande.
5. A réception de la demande de renouvellement du bail commercial, quelles sont les options qui s’offrent au bailleur ?
La demande de renouvellement du bail commercial fait courir un délai de trois mois pendant lequel le bailleur dispose de trois options :
Accepter expressément la demande de renouvellement du bail commercial
Refuser expressément la demande de renouvellement du bail commercial
Garder le silence
a. L’acceptation de la demande de renouvellement du bail commercial par le bailleur
Le bailleur peut accepter expressément la demande de renouvellement du bail commercial formée par son locataire. En cas d’acceptation, aucune forme particulière n’est requise, et le bail sera renouvelé pour une nouvelle durée de 9 ans.
Toutefois, si le bailleur accepte le principe du renouvellement, mais souhaite refuser le loyer proposé par le locataire ou obtenir une modification du loyer, il devra expressément faire connaître le nouveau prix qu’il propose à son locataire. À défaut de faire connaître le loyer qu’il propose pour le local, le nouveau prix ne sera dû qu’à compter de la demande qu’il fera ultérieurement.
A noter ici: le plafonnement ne s'appliquera pas si le bail est renouvelé pour une durée supérieure à 9 ans, ou si le contrat de bail est renouvelé pour une période de 9 ans, mais qu'il avait été initialement conclu pour une durée supérieure à 9 ans.
Enfin, si les parties sont en désaccord sur le nouveau loyer, la partie la plus diligente pourra saisir la commission de conciliation ou le juge des loyers commerciaux aux fins de fixation du loyer.
L’acceptation du principe du renouvellement ne fera pas obstacle à ce que le bailleur puisse ensuite se rétracter et refuser le renouvellement :
Pour motifs graves et légitimes, sous réserve qu’ils n’aient pas été connus de lui à l’époque de l’acceptation, et ce tant que l’action en fixation du loyer n’est pas prescrite
User de son « droit d’option » tant qu’aucun accord n’est intervenu entre les parties sur le montant du loyer et que l’action en fixation du loyer n’est pas prescrite.
b. Le refus de la demande de renouvellement du bail commercial par le bailleur
Le bailleur peut refuser la demande de renouvellement du bail commercial formée par le locataire dans un délai de 3 mois à compter de la réception de la demande de renouvellement. Il devra dans ce cas faire connaître son refus par acte extrajudiciaire précisant les motifs de son refus.
Le refus de renouvellement peut être fait avec offre d’indemnité d’éviction, avec refus d’indemnité d’éviction pour motifs graves et légitimes ou pour dénégation du droit au statut des baux commerciaux ou au renouvellement du bail commercial.
L’acte extrajudiciaire notifiant le refus de renouvellement devra, à peine de nullité, indiquer que le locataire qui entend, soit contester le refus de renouvellement, soit demander le paiement d’une indemnité d’éviction, devra engager une procédure et saisir le tribunal avant l’expiration d’un délai de deux ans à compter de la date à laquelle est signifié le refus de renouvellement.
c. Le silence gardé par le bailleur à la suite d’une demande de renouvellement d’un bail commercial
À l’expiration du délai de trois mois, et en l’absence de réponse du bailleur, ce dernier est réputé avoir accepté le principe du renouvellement du bail et ne peut plus le refuser pour des motifs antérieurs dont il aurait eu connaissance.
Toutefois, cette acceptation ne porte que sur le principe même du renouvellement, et non sur le loyer proposé par le locataire, dont le bailleur pourra encore demande une modification.
À défaut d’accord entre les parties sur le montant du nouveau loyer, la partie la plus diligente pourra saisir le juge des loyers commerciaux afin d'engager une procédure en fixation du loyer.
Votre bail arrive bientôt à son terme ? Il est important d’anticiper son renouvellement afin d'éviter certaines erreurs qui peuvent être lourdes de conséquences.
Que vous soyez bailleur ou locataire, vous pouvez nous contacter pour toute demande relative au renouvellement d'un bail commercial :
Par email: mf@primo-avocats.fr
Par téléphone: 01 89 16 54 74
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